A l'heure actuelle la tendance sur le blog est particulièrement pédagogique et ce n'est pas fini. Avec la refonte du DNB, la rentrée bien évidemment, la responsabilité de prof principal, l'informatique passe loin derrière, je me trouve quelques occupations bien sûr, comme la refonte complète du site du lycée. Je viens de me mettre dans les tripes du thème colormag free, c'est pas mal. Wordpress c'est vraiment puissant, c'est indéniable, néanmoins on réalise que tout est business ou presque. Le thème Colormag dans sa version gratuite fait partie des rares thèmes qui permettent de faire beaucoup de choses, où l'assistance ne fait pas de distinction entre le thème gratuit et forcément le payant qui va derrière. Le but, vendre le plugin pro qui fait plus, vendre le thème premium qui fait plus, vraie réussite du logiciel libre, tellement réussi que la gratuité n'existe plus ou si peu, mais c'est une autre histoire.
Et puis il y a les pannes traditionnelles, genre le café renversé sur le PC. Malgré le nettoyage, le mal est fait, ça fait court circuit sur la machine, comme vous pouvez le constater ci-dessous, j'ai fait sauter le clavier, démarré la machine sans problème et j'ai réalisé la mise à jour vers la version anniversaire. Nombreux étaient les collègues à pester, ils se sont retrouvés avec une mise à jour lancée au mauvais moment, et je dirai que je ne blâme pas Windows. Vous avez des gens qui veulent du tout facile, ne penser surtout à rien, et de l'autre côté vous avez quelqu'un qui va livrer sa nouvelle version de système avec son lot d'amélioration, de correctifs, etc ... Si Microsoft à un moment ne force pas la mise à jour, l'utilisateur ne la fera jamais, et malheureusement il n'est pas anormal d'avoir une mise à jour quand on allume l'ordinateur, et si on allume l'ordinateur c'est pour s'en servir. La mise à jour anniversaire nous pousse un peu vers la nostalgie de Windows 8, l'interface commence à ressembler à nouveau à une tablette, pas formidable. Si vous faites attention à l'écran vous noterez que je suis en train de faire la procédure de nettoyage, un lecteur a donné la procédure en détail, le backlink est gratuit.
Grazoth m'a demandé dans les commentaires comment j'avais la patience d'expliquer quelque chose que j'avais déjà expliqué quinze fois, qui est noté de façon super claire. En fait ça ne tient pas à grand chose : le caractère, le métier et la curiosité. On sait que tout m'énerve mais j'ai la patience d'expliquer, d'expliquer encore. Je crois d'ailleurs que si on n'en est pas capable, il vaut mieux envisager de faire un autre boulot, encore plus avec mon public qui est demandeur. J'ai une masse d'élève qui est en échec scolaire, qui a connu l'échec scolaire, dans 95% des cas, ils ont besoin d'entendre à nouveau l'explication pour eux, si je ne le faisais pas, ce serait comme refuser mon aide, ce n'est pas le genre de la maison.
Et puis il y a indéniablement la curiosité. Dans mon métier on essaie des trucs. A une époque le genre de fiche que j'ai montrée dans le billet, je ne l'aurais pas faite, j'aurai fait construire intégralement le tableau en classe. Je me suis dit qu'avec des tableaux déjà réalisés, les rappels qui vont bien, la majorité des élèves devrait pouvoir retrouver ses billes, ça n'a pas été le cas, il faudra que j'essaie autre chose l'an prochain. Cette année j'enseigne en première BAC PRO, j'ai très souvent enseigné dans cette classe, et la dernière fois ce fut mémorable, une classe où personne ne voulait enseigner avec des gamins que je suivais depuis la quatrième et qui étaient il faut le reconnaître particulièrement difficile. J'ai deux classes de 27 ou 28 élèves dans une salle minuscule où je peine à circuler dans les rangs, les filles font souvent leur effort pour me laisser passer quand je leur dis que mon régime minceur au Nutella ne m'aide pas. J'ai énormément de plaisir à enseigner, on est réellement dans ce qu'on peut attendre d'élèves qui ont de 15 à 19 ans pour la plus âgée, autonomie dans la prise de cours, participation, sérieux. Le niveau quant à lui est très hétérogène, des élèves issus de seconde professionnelle, de seconde générale mais aussi de CAP, j'explique, je réexplique en boucle, comme toujours.
Le BAC PRO de maths pour l'avoir souvent corrigé est une catastrophe qui tourne entre 5 et 7 de moyenne, alors que ce n'est pas bien difficile. Un élève qui sait tracer une courbe, faire le tableau de variations, faire quelques probabilités est à même de s'en sortir sans trop de problèmes pour accrocher la moyenne. L'utilisation de la calculatrice est fondamentale pour obtenir le tableau de valeur et pouvoir tracer la courbe, j'ai donc fourni le document suivant :
Comme d'habitude, ça vaut ce que ça vaut, c'est discutable mais il se trouve que c'est concis, et que si on suit ben ça marche. Dans mon premier groupe de 27 élèves, je pense avoir expliqué pas moins de 15 fois comment utiliser la machine en rappelant la suprématie de la génération Y dans les nouvelles technologies. Je ne mets absolument pas en cause la bonne volonté de mes élèves, je suis passé dans les rangs en disant vous exagérez quand même c'est noté, mais le problème est ailleurs, ma fiche ne sert à rien car ils ne sont plus capables d'apprendre de cette façon, lire c'est pourri.
Je fais un détour et je reviens, je veux appuyer sur lire c'est pourri. Main innocente mon fils doit lire un bout du horla pour lundi, et dans ma grande tradition pédagogique, il sait que la seule unique question que je vais lui poser c'est : "de quoi ça parle". Avec de quoi ça parle vous savez immédiatement si votre gamin est un gros honteux ou non, il est forcé de réexpliquer avec ses mots ce qu'il a compris, ça permet donc de pointer rapidement du doigt les efforts qui ont été faits. Il me raconte donc cette histoire d'un gars qui est persuadé qu'il y a des démons qui mangent sa nourriture pendant qu'il dort, il me fait une narration presque passionnante et avec sa mère on le regarde en lui disant : et tu n'as pas lu la suite ? Ben non, on lui a demandé de lire jusqu'à tel numéro de page, il s'arrête là. Il est capable de regarder jusqu'au bout des merdes innommables à la télé ou sur youtube, plusieurs fois, en boucle, mais lire jusqu'à la fin c'est un travail. En fait, je suis sûr que si je lui mets le horla en vidéo, il va le regarder.
Le problème de l'école pour un enseignant c'est que tu essaies un truc une fois l'an et que si c'est raté tu dois attendre un an de plus, c'est mon cas ici. Je vous garantis que l'an prochain je vous fais une vidéo avec main innocente, le truc bien dégueulasse où on me voit appuyer sur les touches de la machine, je demande à tous les gosses de sortir leur smartphone et leurs écouteurs et à leur vitesse à l'aide de la vidéo de maîtriser le truc. Je suis persuadé que ça passera comme une lettre à la poste car en fait, les gosses ont compris quand je fais les gestes, pas quand il faut les lire parce que c'est tout pourri.
Mon billet s'appelle comprendre car c'est ici toute la subtilité de mon métier et c'est tout ce qui dépasse ceux qui ne le pratiquent pas au quotidien. Un ministre ne peut pas comprendre comment on a glissé d'une génération qui écrivait à une génération qui filme, il faut avoir des gosses dans son entourage, au quotidien pour comprendre ce qui se passe. Certains collègues bien sûr ne veulent pas comprendre et d'autres ne peuvent pas comprendre. Quand on a une pièce de théâtre à lire, on ne peut malheureusement pas tout remplacer par la pièce avec Galabru. Et c'est ici le fond du problème. Il ne s'agit pas de faire des mesures pénibles, sans réelle conséquence à part agacer les profs et les user un peu plus, il faut se pencher sur les gosses d'aujourd'hui pour comprendre que les schémas que nous appliquons depuis 50 ans ne sont plus adaptés et qu'il faut une véritable mesure de fond au point de sacrifier certaines choses. N'allez pas me faire dire qu'on devrait arrêter de faire lire et écrire les élèves, mais on devrait sérieusement s'interroger sur les cours de communication, d'expression orale et sur les techniques de montage vidéo car il n'est pas dit que dans 30 ans, on ne soit plus qu'une poignée de vieux blogueurs à se marave, une génération encore capable de lire et d'écrire, un truc qu'on aura oublié depuis pas mal de temps.